jeudi, mai 26, 2016

Le temps de Neptune et de Ketu


Dix astres qui ne cessent d’inter-agir entre eux, sans compter l’ascendant et autres points forts de nos thèmes, créent une situation complexe de façon permanente. Au sein de cette complexité, Neptune prend actuellement un relief particulier : en domicile en Poissons, opposé par un Jupiter en Vierge conjoint à Rahu et alors que Saturne lui adresse un carré à partir du Sagittaire, il entame sa conjonction à Ketu, le noeud sud de la Lune, un aspect capable, quelquefois, de révéler sa nature la plus riche et la plus profonde, liée à l’empathie positive (l’art d’influencer psychiquement la société), à la dissolution du moi et à la rencontre du sacré.  

Si l’astrologie contemporaine insiste beaucoup sur la notion de cycles, il est tout aussi essentiel de se concentrer sur la notion d’instant, de moment particulier. De part les transits, il est des moments uniques dans nos destinées personnelles et collectives, qui n’arrivent qu’une fois au cours de nos vies. Il faut cependant savoir réagir correctement à ce type d’évènement céleste. Ces passages particuliers, dont il nous est parfois possible d’extirper l’essence, s’associent, pour ceux qui les vivent consciemment et pleinement, à de riches intuitions, à des transformations profondes, à de possibles bouleversements, à des expériences fondatrices ou encore à des rencontres déterminantes. Ce sont des époques spéciales qui marquent nos destinées, car des impulsions, des orientations fondamentales se mettent en place, ou encore, dans les meilleurs des cas, des rêves, des souhaits, des aspirations éclosent et fleurissent. Ce sont des occasions uniques dont il faut profiter et lorsque les noeuds lunaires sont concernés, les possibilités de conséquences tangibles, évènementielles, sont démultipliées.

La rencontre de Neptune et de Ketu dans les Poissons, éclairée et amplifiée par l’opposition actuelle de Jupiter et de Rahu, alors que Saturne impose ses conditions, constitue l’un de ces moments d’exception.  

Jupiter conjoint à Rahu dans la Vierge jusqu’à la fin juillet 

Cet aspect est examiné en détail dans « Quand Jupiter chevauche le dragon ». Rappelons la quête de l’ordre (la Vierge) ici soulignée, essentielle à la guérison, la maladie étant toujours un désordre. Il nous faut d’abord cependant découvrir ce qu’est l’ordre qui doit être naturel, lié à l’intelligence et jamais imposé ou associé à la coercition. C’est essentiel, constatant que notre planète Terre, ainsi que les sociétés et les individus qui y vivent, sont loin d’être en excellente santé. Nous avons ici l’occasion d’ordonner notre chaos intérieur et de changer le monde par la même occasion. Rahu étant de la partie, les difficultés rencontrées, causes du désordre, sont liées à l’avidité matérielle, à l’attachement, à l’anxiété, à la colère et à l’insatisfaction qui sont ici amplifiés.

Neptune conjoint à Ketu dans les Poissons depuis la mi-mai 2016 jusque la mi-février 2017

Ketu a depuis peu pénétré l’orbe de Neptune : à la fois compulsif et spirituel selon le degré d’éveil de chacun, le noeud lunaire sud accompagne Neptune jusqu’en février 2017. En domicile en Poissons, le signe dont « la tête est dans les étoiles et les pieds dans les marécages », l’astre de l’empathie et de la propagande, de la compassion et des mensonges, en est particulièrement coloré. L’individu, selon les configurations de son thème personnel (1), peut s’attendre à des épreuves et à de la souffrance (Neptune), comme à de véritables révélations spirituelles. De même les nations pourraient voguer vers plus d’harmonie et un allégement des barrières culturelles qui les séparent, ou au contraire être alourdies par des compulsions (Ketu) poussant aux illusions, au populisme et à l’identification à un parti, une croyance, un dieu … (Neptune)

Extrait de l’analyse de cet aspect rédigée en début d’année : « Les strates profondes de la conscience collective ressentent un fort besoin d’appartenance, parfois traduit par un réveil du « mysticisme », c’est-à-dire du désir de la dissolution du moi dans une dimension éternelle inaccessible à la pensée. Cette rencontre a des effets très différents selon le niveau de conscience de chacun. (….) Au mieux destruction des illusions par l’intelligence, expériences et «sensations » empathiques et spirituelles authentiques, sentiment d’appartenance et compassion accrues. Dans tous les cas possibilités d’évènements étranges et mystérieux » (2016 mode d’emploi astrologique)

L’opposition Jupiter/Rahu à Neptune/Ketu jusque la fin juillet

Cet aspect amplifie et illumine les significations des noeuds lunaires par rapport aux deux astres concernés. Plus que jamais les notions d’expériences et d’attachement (Rahu) et de compulsions et de détachement (Ketu) sont centrales à la compréhension de la finalité de nos existences. 

Les interprétations sont multiples. Chacun accompagné d’un noeud, les deux astres s’opposent, créant une amplification de l’empathie négative (l’influence du collectif), de l’impact de la propagande et des réactions émotives, d’évènements liés à des émotions négatives, mais aussi, sans doute, d’un profond sentiment d’appartenance à la collectivité humaine inséparable d’une véritable spiritualité (Neptune). Jupiter, le juge, le protecteur, est pris dans la tourmente des émotions, de la sentimentalité et des dissimulations, tout en inspirant le désir d’une justice « divine », supérieure, qui ne peut-être vécue que par la remise en ordre. 

La société dans son ensemble expérimente plus que jamais le pouvoir du cinéma, de la télévision, d’internet et de la politique spectacle. Il est très ardu de discerner le vrai du faux, d’autant que Rahu évoque l’espionnage, les manipulations, les motivations cachées, les accords secrets. Les « éclipses mentales », semblables à des obscurités figées dans le cadre de mémoires ou de traumatismes marquants, sont aptes à matérialiser des évènements difficiles. Elles empêchent de surcroît la clarté intellectuelle (la Vierge) et philosophique (Jupiter) de se manifester pleinement. Qu’il s’agisse de sphères personnelles ou collectives, on fait trop confiance à des gens sachant jeter de la poudre aux yeux. S’ils déclarent oeuvrer pour le bien de la population (Neptune) ou des autres, ou encore au nom de la justice (Jupiter), beaucoup sont en réalité soumis à leurs compulsions (Ketu) et nourrissent de noirs desseins (Rahu).

Et pourtant, si l’on écarte ces voiles négatifs par le biais de l’intelligence (Uranus) et de la réflexion profonde (Saturne), cette quadruple opposition figure une occasion unique de voyager (Jupiter), dans les contrées cachées et parfois merveilleuses (Neptune) de nos coeurs et de nos esprits. 

Par le biais de la justice, de la culture et de la philosophie (Jupiter) et par l’empathie, la communion et la réalisation que nous sommes le monde (Neptune), la société a ici l’occasion et possiblement des circonstances opportunes (les noeuds) de s’éclairer de l’intérieur. Pour les individus capables de visions, de profondeurs, c’est-à-dire moins aveuglés que d’autres par la recherche de la sécurité et de l’intérêt personnel, cette configuration représente des portails grands ouverts, véritables opportunités de jaillissement de lumière. Cela passe par la compréhension de l’insatisfaction (Rahu), éclairé par Jupiter (la philosophie). Quant à Neptune, l’astre mystique en  communion avec l’au-delà de la pensée, il n’est pas impossible qu’il se livre alors, à condition que Ketu, associé au détachement, exprime sa nature purifiée et ouvre ainsi les portes à une spiritualité débarrassée de toute recherche égoïste.

La clef saturnienne

Au carré de Jupiter, de Neptune et des noeuds lunaires pendant toute cette opposition et au-delà, Saturne renforce l’unicité de ce moment et pose ses conditions :  comme le veut sa nature, il est la clef qui permet, ou non, de profiter de cette ouverture. Il réclame la force mentale, la purification des émotions, le sérieux, la patience, la détermination et la profondeur.

Saturne mêle toujours la difficulté et l’obstacle aux impulsions nécessaires à la réalisation. S’il renforce les problèmes qui naissent de la recherche de la sécurité, de la peur, de la souffrance d’être séparé, de l’égoïsme et de l’avidité, il reste le socle de la spiritualité. Il guérit le défaut neptunien de l’illusion, en imposant plus de réalisme et de profondeur à la réflexion et en inspirant une certaine simplicité, voire une humilité, sans compter la force mentale qu’il insuffle et sans laquelle nous ne pouvons rien réaliser.

Si l’on considère que l’opposition Jupiter/Rahu à Neptune/Ketu est une porte à franchir, Saturne en est donc la clef. Celle-ci est liée à nos comportements : la maturité, la patience, la persévérance, la tempérance, le calme, la profondeur sont nécessaires à la solidification de l’influx jupitérien (justice et compassion), à la compréhension de l’insatisfaction (Rahu), à la transformation de la compulsion en détachement (Ketu) et à la destruction de l’illusion (Neptune), afin d’accéder à la réalisation. 

Le temps de Neptune et de Ketu

Neptune est lié à la musique et à la danse. Ainsi que le conseillait Tilopa au Xe siècle : « Devenez tel un bambou creux, vide à l’intérieur. Et soudain, juste à ce moment là, les lèvres divines sont sur vous, un chant s’élève, c’est le chant du Mahamudra (2) »

Certes, ça n’est pas si facile, habitués que nous sommes au conflit et à la philosophie de l’effort. Ainsi rien ne se fera sans Uranus (l’intelligence), ni Mars (la bravoure) qui n’est pas sans poser ses propres conditions actuellement (lire Mars rétrograde attaque), ni sans les autres astres d’ailleurs : la mécanique céleste est un tout et chaque pièce est indispensable. Mais si l’on se laisse porter par ces puissantes énergies qui vibrent en nous à partir de nos systèmes solaires intérieurs, les portes s’ouvrent sans que nos moi s’en mêlent. Nous n’avons rien d’autre à faire que d’être prêts, c’est-à-dire souples, détachés, transparents, à la façon d’un Neptune apaisé et compris. Peut-être obtiendrons-nous alors la compréhension de pourquoi Ketu est lié à l’obtention du nectar d’immortalité.



(1) Les thèmes marqués par les espaces zodiacaux allant du quatrième au dix-huitième degrés des signes mutables (Gémeaux, Vierge, Sagittaire et Poissons), sont marqués de façon plus spectaculaires, mais tout le monde est à même de ressentir et possiblement d’exploiter cet aspect. 

(2) « Le grand symbole », lié à la méditation et à l’éveil.  

CENTILOQUE

CLIQUEZ SUR LE LIEN pour une version entièrement retravaillée du CENTILOQUE, un ouvrage publié en 1993 aux Editions Dervy


Extrait :


1- N°5 : caractère et destinée.


« L’astrologie dévoile les relations intimes qu’entretient le caractère avec la destinée. La destinée d’un individu est l’expression de son caractère ».


Le mot caractère nous vient du grec « kharaktêr », qui signifie un signe gravé. Il signifie également ce qui est propre à une chose, son expression personnelle, son originalité. Par extension, le caractère définit l’ensemble des traits psychiques propres à un individu.


Le caractère se rapporte à la fois à l’expression originale d’un individu et à son thème astral, le signe gravé dans les cieux, qui nous représente et nous définit.


Le caractère est au départ cette infime portion de nos êtres, qui échappe au grand nivellement imposé par l’hérédité et par l’environnement de naissance (racial, familial, social et culturel). Il est ce qui nous rend unique. Au travers de ce petit germe de liberté, la nature développe en nous, patiemment, l'espritla sagesse, le pouvoir et l’amour.


Le terme de destinée est aussi riche en enseignements : il est à la racine du mot destination qui signifie le rôle, l’usage.


Le concept de destinée implique une fonction à remplir. Le caractère actualise la destinée, c’est-à-dire le rôle que nous avons à jouer dans cette existence, un rôle qui n’est pas imposé: on continue à confondre astrologie et fatalisme, on fait d’elle le chantre du c’était écrit, comme si sa fonction se bornait à décrire une destinée transformée en fatum, en une fatalité inéluctable à laquelle nul ne pourrait échapper. C’est tout à fait le contraire, puisque l’astrologie n’a de sens que si elle nous permet d’agir sur la destinée.